À cheval entre la peinture et la sculpture qu’il pratique également, Jean-Edouard Delreux s’est donné pour tâche de concevoir un médium intermédiaire, fusionnel, qui rassemblerait les deux disciplines en une seule. Sur un support plane mais travaillée à la manière d’une sculpture, lui est venue l’idée d’une peinture tangible, palpable, résolument concrète. Pour ce faire, il y développe une relation complexe, mais complémentaire, entre matière et couleur, à ce point qu’il devient difficile de dire si la couleur est au service de la matière ou si, au contraire, la matière ne sert que de support chromatique. Sur l’espace de la toile se dresse une agglomération texturée et organique, mais contenue dans un cadre fermé et protecteur.

 

Le Texturalisme est un art sédimentaire, dans le sens où les oeuvres proviennent de l’accumulation de sédiments divers qui se déposent et se recouvrent. Peinture, corde, plâtre, latex et autres matériaux se superposent comme autant de strates venant définir la texture définitive d’une oeuvre que l’on voudrait toucher autant que regarder. Devenant géologue malgré lui, le spectateur sonde une surface tout en relief, une écorce terrestre mais organique, minérale, filandreuse ou ligneuse, comme si les tableaux avaient été extraits directement d’un sol inconnu et mystérieux.

 

Il ne s’agit pas dès lors d’analyser ou de décrypter l’objet artistique. Pas de symboles ou d’allégories dans cet art résolument concret, physique, texturaliste. La réception artistique se veut directe, brute, de plein fouet, touchant à l’univers fantasmatique du spectateur davantage qu’à son intellect. Relevant essentiellement d’un imaginaire fantasmé et méconnu, de l’artiste y compris, les oeuvres n’ont pas d’ancrage réel dans l’Histoire, et flottent de ce fait dans un no-man’s land générique et temporel, ne relevant pas suffisamment de la Culture pour être déchiffrées.

 

Dès lors, parce que la patte de l’artiste s’efface au profit de la matière, toute puissante et sans âge, qu’elle est aculturelle, apolitique, atemporelle, s’agit-il encore d’art contemporain ? Jean-Edouard Delreux préfère parler d’art « atemporain », en ce qu’il n’est ni passé ni futur, mais est, tout simplement.



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